E. Santarelli, le créateur du Strale

Ettore Santarelli, Italie

Ettore Santarelli nous manque beaucoup. Ce constructeur hors du commun, qui disposait non seulement au niveau de ses talents professionnelles mais également au niveau humain d’un grand rayonnement et d’une forte personnalité, est décédé à l’âge de 72 ans après une grave mais brève maladie.

Ettore Santarelli évitait systématiquement la fréquentation des journalistes de la presse, radio et télévision. Cela ne l’intéressait pas de subir les feux de la rampe, mais bien au contraire, il appréciait les contacts personnels avec les équipiers/ères avant et après les régates, pour parler de sa passion : la voile.

Et de quelle manière il menait les discussions : toujours direct, sans fioritures et avec beaucoup de compétences. Il était pour beaucoup un conseiller infatigable, dans de multiples domaines et sur les thèmes les plus divers.

Une de ses grandes qualités consistait à rendre le monde tout de même assez compliqué de la voile intelligible et clair, même pour un laïc.

Agé de 40 ans, Ettore Santarelli change de domicile et de profession. Il habitait jusque là Ravenna sur l’Adriatique et travaillait en tant qu’ingénieur géomètre à l’état.

STRALE

Ayant déménagé au bord du lac de Garde, il se préoccupe tout d’abord de la plus petite forme de voiliers, les dériveurs. Il dessine et coupe les voiles, que sa femme Alberta Santarelli coud pour la clientèle. Mais bientôt Ettore Santarelli réussi son premier grand coup avec le dériveur STRALE. Le Strale devint rapidement en Italie une classe de bateaux notoire et compte plus de 1200 unités, construites tout d’abord en bois moulé, plus tard en fibres artificielles. On pourrait, si comparaison était possible, apparenter ce bateau à un 505.

IOR

Par la suite Ettore Santarelli fut pendant des années très actif dans la scène italienne IOR, et construisit un nombre conséquent de quart- demi- et trois quarts de tonne. Déjà à cette époque, il préférait pas dessus tout l’étude du prototype, qui pour chaque nouvelle réalisation aiguillonnait ses talents multiples. Etude des règlements de classe, construction, calculs, design, construction des moules, choix des matériaux et mise en oeuvre constituaient pour lui un tout indissociable. Dans chaque domaine il était compétent et instigateur, et la précision avec laquelle il menait toutes ses activités est exemplaire.

Ettore Santarelli était très gêné par le fait que les règlements IOR changent chaque année. De plus, les paramètres en vigueur alors constituaient un véritable handicap pour des conceptions vraiment nouvelles. La région du lac de Garde obtint par l’influence de la scène des LIBERA de nouvelles impulsions et s’éloigna de plus en plus des conventions.

ASSO 99 ONE DESIGN

Le prototype de l’ASSO 99, aujourd’hui bien connu et apprécié, date de 1982. Ce bateau de course construit sous le nom de Modulo 99 convient plus particulièrement aux lacs européens. Conçu à l’origine pour un équipage de 4 – 5 personnes, il démontra dès ses essais un potentiel bien supérieur au prévisionnel. ( Chez beaucoup de constructeurs, c’est souvent le contraire ). Dans un premier temps, L’ASSO 99 se multiplia surtout au nord de l’Italie et au sud de l’Allemagne. Les premiers bateaux ont été importés en Suisse voici 10 ans.

La classe des ASSO 99 constitue aujourd’hui une classe internationale de haut niveau.

Classe IOR MAXI

En 1987/88, Ettore Santarelli conquiert de nouveaux horizons. Il construisit un maxi-yacht dessiné par German Frers dans son nouveau chantier de Sirmione. Cette pièce de 22.5 m fut réalisée en composite ( Kevlar – Airex ) avec cette perfection particulière à Santarelli. Mais les grands voiliers IOR étaient aux yeux de Ettore insuffisamment performants. En mer Méditerranée, ( ou tout le monde sait qu’il manque les grandes vagues de l’océan pour surfer) le speedomètre n’indiquait « que 14 noeuds », ce qui pour lui et selon ses critères, représentait un mauvais équilibre moyens/rendement.

Après cette expérience, Santarelli alors âgé de 64 ans, décida pour l’avenir de ne réaliser plus que ses propres constructions. Il se mit à ses prochaines oeuvres avec beaucoup d’engagement et sans répits.

JOKER, MODULO 105, DOLPHIN 81, MODULO 108, MODULO 45, MODULO 93 ET MODULO 123

Depuis son expérience avec l’ASSO 99 en 1982, Ettore Santarelli savait qu’il s’épanouissait le mieux indépendamment des règlements et recommandations de classes.

Avec son immense expérience et une sûreté indéniable, il conçut de 1989 à 1996 six voiliers et un dériveur ( Modulo 45 ) qui portent tous sa signature emblématique : sans compromis, rapides et tout de même sûrs, faciles dans la main, et qui offrent un plaisir de voile maximal. Ettore Santarelli n’a jamais développé un concept à partir de l’optique de la cabine. Bien au contraire, ce sont toujours les qualités véliques qui furent en tête sur la liste des critères, et ceci se remarque immanquablement dans tous les projets.

Il était toujours fantastique d’observer la façon chaleureuse avec laquelle Ettore échangeait avec « ses amis de voile » . Que ce soit avec ses contemporains à l’occasion de l’assemblée annuelle des STRALE en 1995 ( la classe des Strale est toujours active ! ) ou avec les jeunes régatiers de Joker en automne 1995 à Estavayer-le-Lac, Ettore Santarelli ne faisait pas de distinction.

Ettore n’avait pas d’âge, il était dans ses idées beaucoup plus jeune que certains de 20 ans. Le monde de la voile a perdu un grand homme que l’on surnommait « le Michelangelo delle Barche ».